Une sélection proposée par Nicolas Maury et Soeur Gabriela Enasoae
Peut-on raconter Dieu ? Peut-on raconter l'histoire des hommes et en même temps montrer comment Dieu s'y infiltre ? Voilà le pari que relève Luc, auteur des Actes des apôtres. Il fut le premier à écrire un Évangile suivi d'une histoire des débuts du christianisme. Personne, dans l'Antiquité, ne répétera ce geste après lui. Sans lui, nous ignorerions quelles furent les débuts obscurs et risqués de ce mouvement religieux. Daniel Marguerat expose avec clarté comment Luc construit son grand récit des origines chrétiennes : ses compétences d'écrivain, son intérêt pour l'histoire, les orientations de sa théologie.
Aujourd'hui où la chrétienté se découvre fragilisée, il est urgent de retrouver d'où vient le christianisme et de quelles valeurs il s'est construit à sa naissance. Luc écrit son oeuvre à une époque troublée, où le christianisme cherche son identité dans un marché religieux très conflictuel. Il cherche à dire de quels liens avec le judaïsme naît le christianisme.
L'auteur montre que l'identité chrétienne se profile entre Jérusalem et Rome, profitant à la fois de l'héritage des promesses faites à Israël et de l'universalité de l'empire romain.
UN MILLION DE DOLLARS. C'est la récompense que les trafiquants de drogue offrent à qui voudra bien tuer Alejandro Solalinde, le plus grand défenseur des migrants au Mexique.
Chaque année, plus d'un demi-million de migrants fuient la violence et la misère pour tenter de rejoindre les États-Unis, en quête d'un avenir meilleur. Ils sont sans papiers, sans argent et à la merci des féroces narcos, qui, en plus de vivre de l'argent de la drogue, font fortune sur leur dos.
N'hésitant pas à dénoncer les abus et la violence, Alejandro Solalinde a été menacé de mort à plusieurs reprises par les trafiquants de drogue.
Écrit avec la journaliste Lucia Capuzzi, Les narcotrafiquants veulent ma peau est une suite de chroniques décrivant le contexte social et politique du Mexique et révélant la vie du père Alejandro Solalinde, sa vocation et son oeuvre au profit des migrants d'Amérique centrale, victimes d'enlèvements, de trafic d'organes, de l'esclavage et de la prostitution.
Son histoire, c'est aussi celle des vingt mille autres migrants que le père Solalinde parvient à accueillir et à aider.
Témoignage poignant d'un homme qui, pour servir son Dieu, se met du côté des plus faibles.
Dans le deuxième roman de Joseph Malègue, Pierres noires : Les Classes moyennes du Salut, réalise une « fresque historique » de l'installation de la III e République : laïcité, déclin des notables liés à la Monarchie, l'Église, l'Empire, montée d'une classe nouvelle qui les supplante dans une ville d'Auvergne imaginaire, emblématique d'une mutation de la France toute entière. Malègue observe le déclin de cette classe sociale à laquelle sa famille petite-bourgeoise était liée avec le sens proustien du temps qui passe et la distance du sociologue, sans regret ni révolte. Il se préoccupe surtout du drame spirituel des « classes moyennes du Salut ». Soit les chrétiens attachés à l'évangile, mais peu désireux de lui sacrifier, le cas échéant, leur bonheur terrestre.
Comme dans Augustin ou le Maître est là, Malègue s'y rapproche encore plus de Proust par l'abondance de ce qu'il enregistre, décrit puis dissèque longuement et finement : beauté de la féminité, mais aussi divisions sociales implacables, fortunes détruites, mariages ratés, suicides illustrant la fin des notables catholiques. Pierres noires est considéré par les critiques comme supérieur à son premier roman (Augustin).
Les « pierres noires » sont les pierres volcaniques d'Auvergne et du Cantal avec lesquelles sont construites de nombreuses maisons de ces régions. Les « Classes moyennes du Salut » sont les chrétiens médiocres (où Malègue se situait lui-même), non « classes moyennes de la sainteté ».